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Photographies : Florian Amoser

Room période, une exposition du Collectif Détente

 
1. Clare Kenny, Light headed (I), 2019 et 6. Legless, 2013-2019.

2. Nicolas Delaroche, La maison du jardinier, 2012.

3. Xénia Lucie Laffely, Let me sleep with my snake, 2018.

4. Laura Thiong Toye, Waterful Ring-toss, 2020.

5. David Weishaar, Down Slowly, 2021.

6. Camille Farrah Buhler et Chaïm Vischel, Roomationship Remains, 2020.
… et quelques affaires personnelles.

 

Se jouant des pseudo connivences entre vie quotidienne et art contemporain, mais également des frictions que ce dernier entretient avec la notion de décoratif, Room période nous met face à un intérieur domestique composé d’œuvres… principalement. L’espace domestique convoque l’idée d’un territoire propre ou partagé. A la fois expression d’un goût et d’un mode de vie, il est « lié à des questions de confort, à des questions de prévisibilité et d’habitudes » 1 . Qu’en est-il lorsque cet espace est composé d’un maillage d’objets – œuvres d’artistes provenant d’intentions diverses – destinés à être exposés en vitrine ?

 
En référence au dispositif muséal de la period room qui consiste à reconstituer un intérieur générique et typique d’une époque et d’un milieu social donné, la Placette accueille ici un aménagement curatorial décalé. Se soumettant à l’exercice de l’ensemblier, les trois curateur.trice.s ont invité sept artistes de la même génération, dont le travail propose différents points de vue sur les relations de l’art à la décoration et à l’habitat. La problématique de la hiérarchie des choses et des disciplines– cruciale à toute présentation d’un intérieur habité – est au cœur du travail de Clare Kenny dont les lampes éclairent ici l’espace. Celle-ci se joue des injonctions du high et du low, utilisant notamment les procédés du simili et de l’imitation. Les rapports entre vie quotidienne et œuvres d’art engagent des enjeux socioculturels qui sont autrement présent dans le travail photographique de Nicolas Delaroche. S’intéressant pour sa part à la figure du collectionneur et à son intérieur, il dévoile ici un fragment de l’espace privé de « La maison du jardinier ». Qui habite ces lieux ? En effet la potentielle charge émotionnelle des objets qui nous entourent dépend des histoires individuelles. En cela Room Period brouille les pistes. Les vêtements et le lit évoquent la présence par l’absence. D’une part, le travail textile de Xénia Lucie Laffely pose un regard la place du corps dans la représentation et dans l’espace physique, social ou intime. D’autre part, Roomationship, que l’on lit sur les peignoirs de Camille Farrah Buhler et Chaïm Vischel, évoquent une relation d’individus reposant sur la base d’un habitat partagé, déjouant ainsi les notions de couple ou de famille nucléaire. Finalement, avec Laura Thiong Toye et David Weishaar, c’est le thème du bouquet de fleur et de la nature morte, récurrents en histoire de l’art, qui s’invitent sur nos murs. Jeux de motifs décoratifs luxuriants chez la première et récit suspendu d’un instant familier chez le second, leurs images témoignent toutes deux de la poésie à la fois fugace, triviale et magnifique du quotidien.

Prenant le contre-pied du white cube comme contexte privilégié de l’art, Room période se construit donc comme un décor encombré et séduisant. Les objets/œuvres y perdent leur valeur d’usage pour devenir images dans le cadrage de la vitrine – rappelant celles des magasins d’ameublement et leurs slogans existentiels : « La vraie vie commence à l’intérieur » 2 . L’espace devient alors celui du récit, de la scène. Le vécu se mue en formes artistiques et fictives.

Gabrielle Boder, Tadeo Kohan, Camille Regli

 
1 Vinciane Despret, Habiter en oiseau, 2019
2 Publicité Roche Bobois, cité par Jean-François Staszak, « L'espace domestique : pour une géographie de
l'intérieur, Annales de Géographie, t. 110, n°620, 2001